Une vieille écimeuse transformée en faucheuse viticole extensible
Dans un contexte économique difficile pour la viticulture, le projet VIREG vise à mettre le réemploi de vieux outils agricoles au service de l’innovation en viticulture. Et si la solution pour alléger les coûts et mieux gérer les couverts végétaux se trouvait déjà dans les hangars agricoles ? Cette initiative collective est portée par l’Atelier Paysan, et rassemble 5 groupes de viticulteur.ices d’Alsace, de Rhône-Alpes (Drôme et Ardèche) et d’Occitanie (Aude), en partenariat avec le Bio Civam de l’Aude, les FRCUMA Grand Est et AURA, la FNCUMA, Bio en Grand Est, la Chambre d’agriculture d’Alsace, Agribiodrôme, Bio Occitanie, Chemin Cueillant, l’ADAF, le CFPPA du Haut Rhin et le Grab.
En Occitanie, L’Atelier Paysan a fait équipe avec deux structures locales, le Biocivam de l’Aude et l’association Chemin Cueillant, pour constituer un groupe de viticulteurs de l’Aude et de l’Hérault puis concevoir ensemble un outil qui devait (1) faire appel à du réemploi et (2) aider à la gestion des couverts végétaux.
Le groupe se réunit de nombreuses fois en 2025 pour s’accorder, concevoir puis fabriquer un outil ensemble. Très vite, le choix de l’outil se porte sur une faucheuse de couverts végétaux dans le rang car chacun des quatre viticulteurs du groupe avait un besoin dans ce domaine.
Un des membres du groupe dispose d’une écimeuse qui dort dans les ronces, nous décidons donc d’aller puiser dans ses composants pour construire notre outil. Les moteurs hydrauliques, les lames, les carters et le mât (qui permet de faire monter et descendre l’ensemble de l’outil) nous semblent tous pouvoir être réemployés dans notre faucheuse.

Février 2025 : Nous nous réunissons avec les quatre viticulteurs du groupe pour établir le cahier des charges et esquisser la géométrie de l’outil. Nous décidons que la faucheuse devra être extensible, c’est-à-dire, réglable en largeur afin de pouvoir s’adapter aux différents écartements de rangs. Pour qu’elle puisse convenir à tout le monde, la largeur devra varier entre 1,5m et 2m. Nous réfléchissons à la meilleure manière d’agencer les éléments recyclés ensemble, chacun y allant de son croquis.

Finalement, nous décidons de réemployer un des carters à deux lames pour en faire la partie centrale de notre faucheuse. Nous choisissons d’utiliser deux petits carters à une lame, renommés « satellites » car ils seront placés de chaque côté du carter central et pourront s’écarter plus ou moins, modifiant ainsi la largeur de l’outil.

Le mât de l’écimeuse est également réutilisé dans sa fonction originelle, pour régler la hauteur de l’outil. Un viticulteur du groupe dispose d’un tracteur avec un relevage avant, nous décidons donc que la faucheuse devra pouvoir être accrochée indifféremment sur le mât de l’écimeuse ou sur un relevage avant.
L’Atelier Paysan se charge ensuite de la conception et modélisation 3D d’un châssis permettant de rendre constructible le concept dessiné ensemble. Plusieurs réunions organisées par les animatrices du Biocivam et de Chemin Cueillant nous permettent d’affiner la conception et de trancher sur des choix techniques. Par exemple, nous décidons collectivement d’opter pour l’utilisation de deux vérins hydrauliques indépendants pour piloter l’écartement des deux satellites.

Octobre 2025 : Une fois la modélisation 3D validée par le groupe, les viticulteurs, animatrices, formateur et concepteur se retrouvent à Félines-en-Minervois pour construire le prototype de l’outil. Au cours de ce premier chantier de trois jours, les viticulteurs bénéficient d’une initiation au soudage, à la découpe et perçage du métal et mettent directement en pratiques ces techniques dans la réalisation du châssis. La construction du châssis a été divisé en deux chantiers, au cours du premier, nous fabriquons le châssis et les coulisses qui permettent aux satellites de se translater et nous modifions le mât de l’écimeuse pour qu’elle dispose d’une interface trois points avec la faucheuse.

Décembre 2025 : Nous nous retrouvons tous de nouveau pour un deuxième chantier pour ajouter les vérins et installer tout le circuit hydraulique. Celui-ci comprend un distributeur qui permettra de piloter la hauteur de l’outil et l’écartement de chacun des deux satellites. La réglementation nous interdit de placer ce distributeur à l’intérieur de la cabine du tracteur, nous fabriquons donc un support pour l’installer devant la fenêtre avant du tracteur. Les moteurs hydrauliques des lames seront branchés sur un deuxième circuit et leur mise en marche sera pilotée depuis une manette du tracteur. Nous installons aussi un carter de protection devant l’outil pour rendre l’outil moins dangereux.


Après avoir vérifié tous les branchements, nous testons l’outil : les moteurs hydrauliques réemployés fonctionnent bien, l’écartement des deux satellites également. La pompe du tracteur que nous avions à disposition était cependant défectueuse. La remontée de la faucheuse via le mât était donc très lente et les lames tournaient à faible vitesse.

Nous décidons tout de même d’aller tester l’outil dans des vignes récemment abandonnée sur un couvert spontané sec. Le résultat est concluant : malgré la faible vitesse de lames, le couvert est coupé net. Nous retournons à l’atelier avec la satisfaction d’avoir fabriqué un outil qui remplit pleinement les fonctions espérées. Il nous reste juste assez de temps pour lui mettre une touche de peinture finale et pour l’immortaliser en photo ! Prochaine étape : les tests sur couverts au début du printemps.
Le groupe vous racontera bientôt en détails cette aventure collective dans une vidéo à paraitre. A suivre…

Projet financé par le ministère chargé de l’agriculture (fonds CASDAR Co-Innovation).